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Dad's blog
YouNetDee

10 mai 2004: 26 ans déjà que j'écris avec plus ou moins d'assiduité dans un "journal". Pour qui ? Pour quoi ?
Ne sommes nous pas tous faits de la même pâte ?
La page web consacrée à mon père m'a fait réaliser il y a peu que des sentiments, pour intimes qu'ils soient, n'en sont pas moins universels.
Aussi, à la faveur de la mode des 'blogs', et à l'orée de ma nouvelle vie de papa, ce "journal en ligne" va-t-il succéder au précédent.

Pour satisfaire aux règles du genre, j'ai adopté un ordre anachronologique, illustré mes propos de photos et de liens hypertextes lorsque cela était possible, et je me propose aussi de publier les commentaires qui voudront bien me parvenir sur  en précisant l'emplacement où ils devront apparaître.

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Concert
2 décembre 2018
L'adolescence se caractérise, entre autres, par la recherche constante d'une identité forte.
On s'affirme fan de rap ou de reggae, on se revendique défenseur des loups ou des migrants, on se veut grand sportif aux yeux des autres pour sembler appartenir déjà au monde des adultes.
Sur ce thème pourtant, tu arbores une confiance en toi étonnante et non feinte.
D'où tiens-tu cela ?
Manifestement pas de moi qui, à ton âge était particulièrement torturé, tiraillé sans cesse entre mes aspirations de liberté et mon éducation rigoriste.
Mao
À bien y réfléchir, je pense que ta vie de musicien n'est pas pour rien dans cette belle assurance.
Il faut dire aussi que la musique t'offre de magnifiques occasions d'affirmer ta personnalité et de briller, non seulement auprès de tes pairs, mais aussi aux yeux des adultes. Quel ado n'a pas rêvé d'une performance de soliste dans une salle comble ? Avec une autonomie incroyable, Sans stress ni prétention aucune, tu enchaînes les concerts et les auditions avec, à chaque fois, la reconnaissance des gens du sérail et l'admiration sans borne de tes parents-Moldus.
Depuis peu, outre tes prouesses d'instrumentiste, tu t'investis aussi dans la composition de musique assistée par ordinateur.
Voilà enfin un moyen de passer du temps devant un écran loin du regard réprobateur de papa. Je ne vais pas cacher ma satisfaction, ma fierté. Je suis même sans voix devant ton talent.
Enfin, au delà de la satisfaction de te voir t'épanouir si joliment; face aux changements du monde, à ses excès et ses dérèglements, la musique que tu partages avec nous m'apaise et me redonne parfois confiance dans un avenir meilleur...

Pitchou
17 novembre 2018
À plusieurs reprises cette nuit, j'ai été réveillé par une activité inhabituelle dans la cage à oiseau de la cuisine : La clochette qui tinte, le miroir qui claque.
Pas une seule fois pourtant, je ne me suis dit que ce tumulte était suspect à cette heure-ci, mais plutôt, dans un demi-sommeil :
- Quel con ce piaf, il cherche à bouffer en pleine nuit maintenant !
Et puis, vers 4 heures du mat, des battements d'ailes répétés finissent par me sortir définitivement de ma torpeur.
Je pense alors tout de suite au pire :
- Faudrait pas qu'il ait cassé sa pipe le Pitchou !
Pourtant, comme pour me convaincre du contraire, je pars sur le rituel des réveils d'automne :
Dans la semi-obscurité de la nuit citadine, je recouvre la cage de ma veste avant d'allumer la petite lumière de la cuisine afin que le réveil de l'oiseau ne soit pas trop brutal. Je l'appelle alors par son nom, comme à mon habitude, avant de soulever doucement le vêtement.
Quand on craint le pire, c'est toujours le pire qui arrive, t'as jamais remarqué ?
Le perchoir est vide et le pauvre piaf gît, couché sur le dos au fond de sa cage.
- Merde ! Merde ! Merde ! Quel con je fais, il a agonisé toute la nuit et je n'ai pas été fichu de m'en rendre compte...
J'aurais dû le sentir avant, le prendre contre moi pour apaiser ses derniers instants, au moins qu'il ne soit pas seul...
Ça doit être affreux de mourir seul dans le noir.
Voilà que je me surprends à faire de l'anthropocentrisme maintenant. Après tout, qu'est-ce que j'y connais de la vie et la mort des perruches ondulées ? Dans le même temps, je m'en veux un peu d'être soudain si triste pour un si petit oiseau. N'y a-t-il pas assez de souffrances humaines sur Terre pour remplir notre quota de mélancolie ?
Mamie
Le terrain est glissant mais, emporté par les circonstances, j'ose la mise en perspective à la façon d'un Harari :
En quoi est-ce que la vie d'un humain aurait plus de valeur que celle d'une perruche ? Parce qu'on nous le rabâche depuis des millénaires dans les textes sacrés ?
En quoi la mort d'un chasseur qui se fait étriper par un sanglier protégeant ses petits serait-elle plus triste que celle des marcassins affamés à trop téter le cadavre de maman sanglier ?

Je devais aller faire les courses ce matin mais je vais plutôt attendre ton réveil car je veux être auprès de toi quand tu vas réaliser la mort de notre fidèle compagnon.
Il faut dire aussi que ce piaf a partagé plus de la moitié de ton existence et la presque totalité de nos déjeuners à la maison, à courir, en mode "boule de flipper", d'une assiette à l'autre jusqu'à extirper un spaghetti, une olive ou un bout de fromage d'une assiette mal défendue.
Ces derniers temps, il est vrai, il était beaucoup moins entreprenant, ne jouant plus, marchant péniblement, se tenant courbé, toujours à la même place sur son perchoir. Un vieil animal en somme.
Ce qui nous brisait le cœur plus que tout, c'est lorsqu'il n'arrivait plus à regagner sa cage en volant. On le ramassait alors au sol pour le déposer délicatement à proximité de son perchoir.
Il y a quelques années encore, j'aurais sans doute essayé d'atténuer le traumatisme pour toi, comme à l'époque où notre précédente perruche s'était fait la malle par la fenêtre, mais il s'agit désormais d'une expérience de vie trop importante pour toi.
Car à décrire les maladresses et la fin de vie de Pitchou, il m'apparaît maintenant comme une évidence que la mort du piaf sonne comme la répétition générale de la disparition de ma propre mère.
Elle aussi éprouve de plus en plus de difficultés à gravir les quelques marches la menant à son appart. Elle aussi halète au moindre effort, marche en titubant et quitte de moins en moins sa chaise devant la télé...

Brave Pichou ! Tes petits pas tapant sur la nappe de la cuisine me manquent déjà... Au moins dans ta vie auras-tu réussi à éviter de te faire chier à prier le Dieu des oiseaux de t'accorder une place au chaud après avoir calanché...

24 novembre 2018 :
Ce samedi, on décongèle le Pitchou, non pour en faire des brochettes, mais pour lui offrir un dernier hommage sous la forme d'un enterrement à la hauteur de la joie qu'il nous a procurée pendant toutes ces années.
C'est ainsi au bord de l'étang du Méjean que repose désormais feu-notre ami ailé.
On se sent tous bouleversés de retour à la maison, emprunts de ce sentiment étrange que la vie, le bonheur, ne tiennent qu'à un abattement d'aile...

Grand Galibier
15 août 2018
Maman au boulot, mamie au Canada, nos agendas à tous nous gratifient cette année de plusieurs jours tous les deux à la montagne, "like father and son".
Loin des préoccupations lénifiantes du quotidien, on se fabrique alors un programme sur mesure fait de grasses matinées paresseuses, de balades au village pour aller "choper le wifi", mais aussi de réveils aux aurores, point de départ à de grosses randos en montagne lors desquelles les discussions vont bon train.
On évoque ainsi beaucoup les années qui filent d'autant plus vite que tu en prends conscience d'ailleurs, ton avenir encore incertain qui oscille entre la musique et les sciences, ou le cul des filles aux championnats d'Europe d'athlétisme.
Tu m'interroges encore pas mal sur ma vie amoureuse passée, ce qui crée entre nous une complicité nouvelle des plus sympathiques.
À l'heure où de jour en jour tu aspires à toujours plus d'autonomie, je sens bien aussi que papa et maman constituent pour toi un point de repère solide.
Dans ces moments là, je me dis qu'on a pas trop mal réussi ton éducation.
Lorsqu'on évoque ce dernier point, tu le reconnais d'ailleurs fort volontiers, avec toutefois un seul regret : que je ne t'ai pas appris à jouer au ballon
Je t'explique alors qu'il m'est difficile de t'apprendre quelque chose que j'ignore. Tu le reconnais de bonne grâce -ouf...

Better by bike
2 mai 2018
J'aurais pu évoquer longuement tous les changements qui bouleversent ton corps depuis des mois :
Ta taille qui n'en finit pas de grandir, ta voix qui a perdu un octave en un an et que je ne reconnais plus au téléphone, tes épaules qui s'élargissent...
Tout cela va de pair avec d'autres modifications plus radicales encore comme l'autonomie qui t'emmène chaque jour un peu plus loin de nous.
Il est vrai que tu sillonnes désormais la ville seul à vélo pour aller à l'école, mais aussi au conservatoire ou chez tes copains.
Bien sûr, je lai fait avant toi et dans des conditions bien moins sécuritaires, mais je ne peux m'empêcher de m'inquiéter en silence dès que je te vois enfourcher ton vélo sans moi.
Sentiment un peu ambigu d'ailleurs car dans le même temps, je suis aussi très fier d'avoir pu te transmettre l'amour de la bicyclette, tellement essentiel à tout homme de raison.
Mais au delà de toutes ces évolutions finalement assez prévisibles, demeure l'essentiel, à savoir la joie de vivre que tu irradies.
La joie de vivre et aussi, pour notre plus grande satisfaction, l'amour de tes parents dont tu nous combles encore chaque jour.

NY2018
10 avril 2018
Ça fait plusieurs jours déjà qu'une douleur au ventre me suit du réveil au coucher...
Un truc mal digéré, une infection quelconque, qui sait...
Et puis, tandis que la douleur se précise, l'origine de ce mal m'apparaît dans toute son évidente simplicité : tu pars en voyage dans deux jours !
Alors bien sûr, quoi de plus sympa que de partir en virée à New-York avec sa classe ? C'est sûrement là une expérience unique qui te marquera pour longtemps, mais te savoir si loin de nous pour 10 jours a tout de même de quoi inquiéter le papa poule que je suis...
Et puis, comme à l'accoutumée, quand on craint d'être submergé par les événements, on les prend comme ils viennent, l'un après l'autre, et c'est ainsi que je me retrouve à l'aéroport, tentant maladroitement de jouer l'indifférence au moment de te laisser partir avec ta classe.
Les jours qui suivent, au lieu de profiter de la liberté retrouvée, comme me le conseillent certains, je me retrouve connement prisonnier de mon smartphone, à guetter la moindre activité sur WhatsApp.
Aussi, depuis ton départ, tes affaires éparpillées un peu partout dans la maison ma taquinent à chaque regard, pour me rappeler sans cesse que tous ces petits bouts de toi sans toi ne sont rien.
C'est un peu la répétition générale de ton "grand départ", car comme dit maman, la vie que l'on partage au quotidien avec ses enfants n'est qu'une petite part de notre vie d'adulte. Pourtant, la moitié déjà de cette petite part nous a si profondément changés que j'ai bien du mal à envisager ce que pourrait bien être la vie sans toi à nos côtés.
Et puis au final, indépendamment de mes états d'âme, il semblerait que tu ne gardes pas de ce voyage un souvenir impérissable.
L'accueil de ton correspondant à la maison quinze jours plus tard confirmera malheureusement ce sentiment.
C'était bien la peine de mettre ton père dans des états pareils...
Pourtant, "à quelque chose malheur est bon" :
J'ai redécouvert le plaisir de finir le paquet de cookies au chocolat sans un soupçon de culpabilité et c'est aussi cette expérience comme toutes celles à venir qui illustrent à merveille l'adage prophétique :"if you want to keep your children, you have to let them go!".

Ski à Montpellier
28 février 2018
Depuis l'année 2007 où j'avais raté de grosses chutes de neige sur Montpellier, je garde ce rêve de skier un jour sur la plage...
Aussi, la météo prévoyant aujourd"hui de grosses précipitations neigeuses sur l'Hérault, on se met en route vers 10 heures pour Palavas-les-flots, avec les skis de fond dans la voiture.
Arrivés à destination, on découvre le littoral recouvert d'un bon tapis de poudreuse...
Je garderai longtemps en moi ces images surréalistes de ski sur la plage à quelques mètres à peine du ressac avec, en toile de fond, la grève enneigée.
Heure après heure, l'épaisseur de poudre devenant confortable, mon ami reprend la voiture avant que les routes ne soient impraticables tandis que je décide de regagner Montpellier à ski en empruntant la piste cyclable qui longe les étangs -15 km.
Au bilan, il mettra cinq heures pour regagner son domicile et mois deux ! Une fois en ville, je passe te chercher et on repart tous les deux à ski faire le tour du centre ville totalement déserté par voitures, bus et trams.
L'ambiance est hyper-sympa, entre les passants souhaitant faire des selfies avec nous et les batailles de boules de neiges sur l'esplanade du Peyrou.
Au final, on rentre à la maison à la nuit tombée, trempés, fatigués mais comblés.
Je suis tellement heureux d'avoir pu partager ce moment unique avec toi.
C'est qu'avec le temps et l'adolescence, ces tranches de complicité ne sont plus si fréquentes, raison de plus pour en profiter au maximum...

JVB2018
25 février 2018
Cette année encore, les vacances de février riment avec concours national Jeune Vent Basson.
Pour l'occasion, il nous faut même écourter les vacances au ski afin d'être à temps à Tours pour la répétition du vendredi.
C'est ton choix, on ne discute pas, même si nous trouvons l'addition un peu salée cette fois-ci avec 1200 km au compteur de la voiture et un jour de RTT posé...
Ton créneau de passage pour le concours est fixé au samedi, à 9h30.
Le lendemain, nous sommes bien sûr largement à l'avance au conservatoire. Maman et moi nous plaçons de part et d'autre de l'auditorium; toi dans les coursives à "chauffer" ton instrument et patienter jusqu'à l'appel fatidique...
Te voilà enfin sur scène... Un signe de tête au pianiste, un regard aux jurys et te voilà lancé...
Cela fait pourtant des mois que nous t'entendons répéter ce morceau, mais aujourd'hui, tu es tellement investi dans ton interprétation que les notes semblent s'enchaîner avec une beauté inédite. Tu as aussi tellement d'allure sur scène que je ne peux retenir mes larmes.
Lorsque je me retourne vers maman, je constate qu'elle vit, elle aussi, les mêmes émotions que moi, transportée par la magie de la musique et de l'amour qu'on éprouve si fort pour toi.
Aujourd'hui plus que jamais, nous sommes absolument ravis de ton choix de devenir musicien. C'est une école de la rigueur et de l'excellence que peu de domaines offrent de nos jours, et surtout pas l'éducation nationale où, année après année, le niveau d'exigence est sans cesse revu à la baisse et où la médiocrité est érigée en modèle.
Tu ne tardes pas d'ailleurs à en faire l'amère expérience...
Après avoir passé une bonne partie de tes vacances à rédiger un rapport de stage exhaustif, de retour au collège, le prof de techno chargé d'évaluer ton travail décide que celui-ci ne peut avoir été fait par un enfant de 13 ans et refuse de te noter.
Face à ta déception, je rencontre le prof pour lui expliquer notre version des faits. Il consent alors à reprendre ta copie, mais c'est finalement pour que ce connard revanchard t'attribue la plus mauvaise note de la classe au prétexte, cette fois-ci, que tu n'as pas respecté les consignes !
Tu aurais dû, selon lui, restituer un rapport bien moins fourni, avec des idées et considérations beaucoup plus simples...
Ne sois surtout pas trop ambitieux, fils, et tu réussiras dans l'éducation nationale...

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